La Poste. Le blues des facteurs de Trégueux Publié le 25 janvier 2017 à 09h25 Julien Vaillant Les facteurs trégueusiens n'en peuvent plus de voir leurs collègues des autres communes finir leur service tous les jours avant eux. Les facteurs trégueusiens n'en peuvent plus de voir leurs collègues des autres communes finir leur service tous les jours avant eux. Jugeant leurs tournées totalement déséquilibrées par rapport à leurs collègues de Saint-Brieuc, Langueux et Ploufragan, s'estimant méprisés par leur direction et décimés par les arrêts maladie, les six facteurs de Trégueux (22) lancent un cri d'alarme.
« Fatigue », « souffrance », « syndrome anxio-dépressif », « pleurs », « ras-le-bol ». Ce jeudi après-midi, à la table d'un restaurant trégueusien, les visages sont tristes et les paroles transpirent le mal-être. Autour de Jennifer Simon, la secrétaire départementale du syndicat Unsa Poste, ils sont six facteurs. Des quadras et des quinquas qui s'affirment malades de leur travail et constatent le même phénomène : « Les uns après les autres, nous nous retrouvons tous en arrêt de travail », indique Thérèse
.
Quatre facteurs sur six déjà arrêtés
Comme ses collègues, la postière est formelle : « Notre direction ne veut pas admettre que les tournées ne sont pas équilibrées. Pourtant, cela fait un an que nous le signalons. » « Les facteurs de Saint-Brieuc, Langueux et Ploufragan finissent souvent deux heures avant nous. Nos chefs sont au courant. Pourquoi ne font-ils rien ? », questionne de son côté Pierre. « Nous en sommes ni entendus, ni pris en compte. C'est peut-être ça qui fait le plus mal. »
Sur les six facteurs trégueusiens, quatre ont récemment connu la dépression ou le burn-out. « J'ai été trois mois en arrêt. Le message de la direction, ça a été de me dire : "Les CDD, eux, arrivent très bien à faire ta tournée sans dépassement d'horaire". Je me suis sentie comme une merde », témoigne Christine, tandis que sa collègue Françoise se souvient : « Pendant mon arrêt, je ne pouvais pas passer devant les locaux de La Poste. Heureusement que ma fille et mon compagnon m'ont aidée à m'en sortir ».
Le début des ennuis, l'équipe le situe à l'entrée en vigueur de la dernière réorganisation en date, celle de 2015. Depuis, à l'instar de leurs collègues de Langueux et Ploufragan, les Trégueusiens prennent et finissent leur service au bureau de poste de Saint-Brieuc Liberté. Mais à la différence des autres, ils rentrent plus tard. « Samedi encore, j'ai stoppé ma tournée à 14 h, sans l'avoir terminée, parce que la direction ne veut pas que nous rentrions après 14 h 30 ce jour-là », relate Jean-Louis. « Nous prenons des risques sur la route », renchérissent ses collègues.
"Le pot de terre contre le pot de fer"
« Les tournées des facteurs de Trégueux sont organisées dans le cadre légal des 35 heures. Ils peuvent dépasser l'heure, ça arrive. Mais la plupart du temps, ils finissent avant 14 h. Et ce qu'ils ne peuvent pas supporter, c'est que les autres terminent encore plus tôt qu'eux », explique la direction de La Poste, qui réfute pourtant « tout déséquilibre de tournée », avant de poursuivre : « Ces agents ont été reçus par leur encadrement, l'assistance sociale, la médecine du travail. Nous avons mis en place tous les dispositifs existants au sein de l'entreprise ».
« La Poste aura toujours raison face à nous. C'est le pot de fer contre le pot de terre », se désole Jean-Louis qui appelle ses responsables à le suivre, ainsi que ses collègues, une semaine durant. « Pourquoi ne veulent-ils pas nous accompagner ? Craignent-ils de constater que nous avons raison ? »
* Les prénoms ont été modifiés à la demande des facteurs.
Le Télégramme -