Une filiale de La Poste accusée de travail dissimulé à grande échelleUne cinquantaine de salariés de Mediapost, une entreprise de distribution publicitaire, accuse cet employeur de ne pas facturer la totalité des heures travaillées, si bien qu'ils seraient in fine rémunérés bien en-dessous du smic.
Une filiale de La Poste accusée de bafouer le droit du travail à grande échelle. Une cinquantaine de salariés de Mediapost, entreprise spécialisée dans la distribution de prospectus, a saisi les prud'hommes, accusant leur employeur de s'être rendu coupable de «travail dissimulé», souligne RTL ce mardi. Ils accusent Mediapost de leur imposer des objectifs de distribution de prospectus irréalisables, ce qui les contraint à travailler au-delà des heures rémunérées pour venir à bout du paquet de publicités qui leur a été remis.
Sur les 12.000 salariés que compte cette entreprise, une dizaine d'autres sont sur le point de leur emboîter le pas - ils s'attachent actuellement à calculer leurs salaires non versés. Les salariés de Mediapost et de son grand concurrent, Adrexo, sont en effet plutôt réticents à contester leurs conditions de travail: notamment composés d'étudiants ou de retraités qui distribuent des prospectus quelques heures par semaine pour arrondir leurs fins de mois, ils sont souvent en situation de précarité. Pourtant, selon l'avocat des plaignants, Christophe Bastiani, c'est l'ensemble du système de comtabilisation du temps de travail de ces deux entreprises, qui représentnt à elles-seules la quasi-totalité du marché, qui s'avère irrespectueux du droit du travail. Soit plus de 30.000 salariés concernés!
«Plusieurs centaines de millions d'euros soustraits»
«Ces entreprises n'ont pas le droit de calculer à l'avance le temps de travail de leurs salariés. Elles le font en vertu d'un décret qui a été annulé en 2012 par le Conseil d'état parce qu'il était illégal. Grâce à cela, elles les rémunèrent de fait largement en-dessous du smic, parfois d'un tiers voire de la moitié. Elles ne peuvent pas délocaliser ces emplois mais elles pratiquent de fait des salaires largement inférieurs au minimum légal français. On peut évaluer à plusieurs centaines de millions d'euros les sommes soustraites aux salariés et à l'Etat», estime Christophe Bastiani. Pour FO, l'écart de rémunération tournerait plutôt aux alentours de 20%, mais avec de très fortes disparités entre les sites de Mediapost.
L'avocat affirme disposer d'une note de la direction régionale du travail contestant le système mis en place chez Mediapost. Plusieurs inspecteurs du travail ont aussi localement réprimandé la filiale de La Poste pour ce motif, confirme un syndicaliste. Selon lui, les enquêtes seraient toutefois pour l'instant suspendues, car Mediapost travaille à un nouveau système de quantification du temps de travail, cette fois basé sur la géolocalisation des salariés et donc sur le temps réellement travaillé. Ce système est en cours d'expérimentation sur deux sites pilotes. «On négocie encore avec les organisations syndicales, rien n'est signé», avertit cependant La Poste. Un accord de branche est parallèlement en cours de discussion. D'ici à son adoption, les prud'hommes devraient avoir examiné la demande des salariés de Mediapost.
Par Marie Bartnik - Le Figaro